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Obligation de relogement à la charge de l’aménageur

Cass. Civ III : 13.7.16
N° Pourvoi 16-40214

Les dispositions relatives à l'obligation de reloger les occupants de bonne foi dans le cadre d'opérations d'aménagement urbain (CU : L.314-1 et L.314-2) ou d'éradication de l'habitat indigne (CCH : L.521-1) font l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

En 2012, la Cour de cassation a considéré que les occupants étrangers en situation irrégulière pouvaient bénéficier de la mesure de relogement précisant que « l’obligation de reloger qui relève de l’ordre public social, est prévue de la manière la plus large pour tous des occupants de bonne foi, sans distinguer s’ils sont ou non en situation irrégulière » (Cass. Civ. III : 12.9. 12, n° 11-18.073). 

Dans sa QPC, le demandeur faisait valoir qu’en imposant le relogement des occupants de bonne foi en situation irrégulière sur le territoire français au propriétaire d'un immeuble acquis en vue d’une opération d’aménagement dans un but d'intérêt général, ces dispositions étaient susceptibles de porter une atteinte disproportionnée aux conditions d’exercice du droit de propriété. En effet, le relogement de ces personnes ne peut intervenir légalement dans le parc social et est difficile à mettre en œuvre dans le parc privé (relogement dans le parc privé 

via l’intermédiation locative ou logement de transition dans l’attente d’un relogement définitif). 

La Cour de cassation retient le caractère sérieux de la question posée, et estime que ces dispositions sont susceptibles de porter, aux conditions d'exercice du droit de propriété, une atteinte disproportionnée au regard du but recherché, d’où le renvoi en QPC.

Cass. Civ III : 5.10.16
Cons. Constit : QPC n°2016-581

Les dispositions relatives à l’obligation de reloger les occupants de bonne foi dans le cadre d’opérations d’aménagement urbain (Code de l’urbanisme : L.314-1 et L.314-2) ou d’éradication de l’habitat indigne (CCH : L.521-1) ont fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) transmise au Conseil constitutionnel, la Cour de cassation ayant retenu le caractère sérieux de la question posée (Cass. Civ III : 13.7.16).

Dans sa QPC, le demandeur faisait valoir qu’en imposant le relogement des occupants de bonne foi en situation irrégulière sur le territoire français au propriétaire d’un immeuble acquis en vue d’une opération d’aménagement dans un but d’intérêt général, ces dispositions étaient susceptibles de porter aux conditions d’exercice du droit de propriété une atteinte disproportionnée. En effet, le relogement de ces personnes ne pouvant, de par la loi, intervenir dans le parc social, le demandeur soulignait la difficulté pratique à mettre en oeuvre cette obligation (relogement dans le parc privé via l’intermédiation locative ou logement de transition dans l’attente d’un relogement définitif).

Le Conseil constitutionnel a considéré :

  • que l’obligation de relogement instituée par les dispositions contestées n’entraîne aucune privation de propriété (au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789) ;
  • qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu protéger les occupants évincés et compenser la perte définitive de leur habitation du fait de l’action de la puissance publique. Ainsi, l’obligation de relogement, en cas d’éviction définitive, met en oeuvre l’objectif de valeur constitutionnelle que constitue la possibilité pour toute personne de disposer d’un logement décent ;
  • qu’à supposer que le relogement des occupants évincés soit susceptible de se heurter à des difficultés pratiques, celles-ci ne sauraient être retenues pour l’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées ;
  • qu’il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que le fait de reloger dans le cadre et les conditions déterminées par l’article L.314-2 du Code de l’urbanisme ne peut caractériser une infraction pénale. L’obligation de relogement prévue par les dispositions contestées ne peut donc exposer à des poursuites pénales pour délit d’aide au séjour irrégulier.

En conclusion, la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L.314-2 du Code de l’urbanisme, est déclarée conforme à la Constitution.

La même analyse vaudrait en habitat indigne : le propriétaire étant tenu dans les mêmes conditions à une obligation d’hébergement ou de relogement.

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